Mon intervention lors de la remise de mon rapport sur la Mission d’Information sur l’Aide Sociale à l’Enfance

Je tiens avant toute chose à saluer chacune et chacun d’entre vous : le Président Alain Ramadier, les Députés et les administrateurs de l’Assemblée Nationale pour leur remarquable travail, sans lesquelles nous ne serions pas réunis aujourd’hui. Et évidemment toutes les personnes qui se sont mobilisées et qui se mobilisent toujours autour de ce dossier que représente « l’Aide Sociale à l’Enfance », notamment toutes les personnes auditionnées.

Cette Mission d’Information concerne 341 000 enfants pris en charge par l’Aide Sociale à l’Enfance. Nous parlons bien là « d’Enfants ». Là est notre responsabilité.

Ce rapport n’est pas une première ni une fin. Je le regrette. Il est une nouvelle étape pour trouver ensemble les bonnes solutions dans l’intérêts des enfants, mais surtout de les mettre en applications. J’y serai attentive et intransigeante.

Cette mission fait suite à un travail personnel de 18 mois, et 23 députés, de toutes tendances politiques m’ont accompagné pendant ces 3 derniers mois. Par ce travail collectif : 33 auditions menées et 18 propositions accompagnées de nombreuses suggestions que nous vous présentons aujourd’hui – nous avons tenté de mener une étude approfondie sur les résultats de cette politique de l’Aide Sociale à l’Enfance et d’y apporter de vraies réponses avec une seule primauté « faire de ses enfants une priorité absolue, qu’ils soient au cœur de nos préoccupations afin de leur donner un véritable avenir, voire l’égalité des chances, principe fondateur de notre République ».

Notre travail n’a pas eu pour vocation d’émettre une opinion mais bien d’éclairer une politique, parfois dépassée, pour lui permettre un changement et des prises de décisions rapides.

En 2018, 341 000 mesures de protections ont été prononcées, dont 52% concernent des placements.

Les résultats de cette politique publique me laisse perplexe…:

  • à l’école, lieu ô combien précieux, 2/3 des enfants placés ont au moins un an de retard en 6ème,
  • à 17 ans, 23% des enfants de l’Aide Sociale à l’Enfance ne sont plus scolarisés (soit 9,6%), 5% d’entre eux seulement suivent un cycle général ou technologique contre 49%,
  • à 17 ans, les jeunes femmes de l’Aide Sociale à l’Enfance ont 13 fois plus de risque d’être enceinte,
  • 30% des utilisateurs de services d’hébergement temporaire et de restauration gratuite, nés en France, ou y étant arrivés avant l’âge de 18 ans sont des anciens enfant de l’Aide Sociale à l’Enfance,
  • 25 % des Sans Domicile Fixe, âgés de moins de 25 ans ont été placées en foyer ou en famille d’accueil,

Je tiens également à citer un passage du 24e rapport de la Fondation Abbé Pierre sur le mal-logement qui démontre la difficulté pérenne de ces enfants lorsqu’ils sont mal accompagnés : « parmi les personnes qui ont connu la rue après l’Aide Sociale à l’Enfance, 21 % l’ont connue moins d’un an après leur sortie, tandis que 39 % l’ont subie plus de 10 ans après ».

Tous ces éléments m’ont amené à demander une Mission d’Information. Je tiens à ce titre à remercier le Président de l’Assemblée Nationale et la Conférence des Présidents d’avoir pris la mesure et la gravité du sujet et d’avoir créé une mission d’Information qui a été accepté le 5 mars dernier par la Conférence des Présidents de l’Assemblée Nationale.

L’Aide Sociale à l’Enfance est une politique décentralisée portée par les Conseils Départementaux. Ils doivent apporter un soutien matériel, éducatif et psychologique tant aux mineurs qu’à leur famille confrontées à des difficultés qui risquent de mettre en danger la santé, la sécurité, la moralité de ces mineurs ou de compromettre gravement leur éducation ou leur développement physique, affectif, intellectuel et social.

Les Départements consacrent un budget conséquent à l’Aide Sociale à l’enfance – soit près de 8 milliards d’euros, en augmentation constante, en excluant la situation difficile que connait le Département de Mayotte et hors masse salariale.

Mais des disparités existent car nous constatons que certains consacrent 5% de leur budget à l’Aide Sociale à l’Enfance quand d’autres portent leurs efforts à 20%.

Les Départements ont le choix. Ils peuvent gérer l’Aide Sociale à l’Enfance directement – en régie – ou avec le concours d’établissements et de professionnels dûment habilités mais la décentralisation engendre autant de politique d’Aide Sociale à l’Enfance qu’il existe de départements, compte tenu de la variété de leurs choix politiques mais aussi de fonctionnement.

Nous constatons également des variabilités de coûts des mesures de l’Aide Sociale à l’Enfance. Par exemple, le prix moyen d’une journée en famille d’accueil est de 100 euro, il est seulement de 48 euros dans les Alpes-Maritimes. Ou encore, le prix d’une journée d’action éducative en milieu ouvert varie entre 8 et 20 euros.

Tout ceci peut altérer la qualité de prise en charge de l’enfant. 101 départements, 101 politiques d’Aide Sociale à l’Enfance, ce n’est pas et ce n’est plus acceptable !

L’Aide Sociale à l’Enfance c’est aussi une multitude d’acteurs qui interagissent : la Justice, l’éducation Nationale, les professionnels de santé, l’Administration Centrale ou encore la Protection Judiciaire de la Jeunesse… sans oublier les organismes nationaux comme le GIPED, le CNPE, l’ODAS, l’AFA, le HCFEA… pardon pour ceux que je n’ai pas cité, mais je suis forcée de constater que le dialogue est trop rare entre ces acteurs. l’état doit donc reprendre une place majeure dans cette politique, que je considère régalienne, c’est pourquoi, je souhaite la création d’une Agence Nationale de Protection de l’Enfance qui serait co-pilotée par l’état et les départements afin d’assurer une application homogène de la politique d’Aide Sociale à l’Enfance. Nous souhaitions la nomination, auprès de chaque Préfet, d’un référent « protection de l’enfance » au même titre que le Délégué à l’Egalité Femme / Homme afin de coordonner le pilotage départementale.

Tout au long de notre travail ont raisonné les témoignages courageux et bouleversants des anciens enfants confiés à l’ASE, pendant leur audition. Je tiens une nouvelle fois à les remercier pour leur aide et leur contribution au travail de cette Mission car ils nous ont apporté plusieurs suggestions notamment en nous rappelant que le passage devant un juge est une épreuve difficile. Pour cette raison nous souhaitons rendre obligatoire la présence d’un avocat auprès de chaque enfant lorsqu’une mesure d’assistance éducative ou de placement est envisagée, bien entendu pris en charge par l’aide juridictionnelle.

Enfin, la politique de l’Aide Sociale à l’enfance, doit permette à ces enfants d’avoir les mêmes chances que les autres. à ce titre, deux points doivent être améliorés : la santé et la scolarité.

Chaque enfant de l’Aide Sociale à l’Enfance doit, dès le premier mois de placement, bénéficier d’un bilan de santé complet, de lui apporter, si besoin, un suivi psychologique tout au long de son parcours en permettant d’avoir accès à des professionnels de ville quand les CMP et CAMPS sont engorgés voire débordés.

Enfin, chaque enfant à le droit à une scolarité digne et de choisir son parcours. Trop d’enfants sont déscolarisés, nous devons donc nommer des professeurs des écoles dans les structures d’accueil d’urgence.

Mon intervention, vous l’aurez compris, n’est pas exhaustive. Je vous invite donc à lire attentivement notre rapport mais surtout ses 18 propositions.

Je serai vigilante et intransigeante quand à la prise en compte des recommandations que nous faisons. Car compte-tenu de mon passé, il est difficile pour moi  de constater, que 20 ans après, des enfants subissent les mêmes violences, les mêmes manques d’accompagnement et de considération.

Désormais, nous devons, en France, mettre l’Enfant au cœur du triangle état / Départements / Société et porter cette ambition à l’échelle européenne notamment pour les difficultés rencontré par les Mineurs Non Accompagnés.

Je vous remercie pour votre écoute et je suis disponible pour répondre à vos questions.

 

Pour en savoir plus : 

Le communiqué de presse

La synthèse et les propositions de la mission ASE

Le rapport de la mission d’information

Cette publication a un commentaire

  1. Lamblot Jacques

    Hélas j’ai pu juger des graves déficiences et même des vices de l’aide sociale a l’ enfance dans son ensemble ! Juges des enfants incompétents faisant des jugement entachés d’erreur grave et refusant de corriger ces erreurs en disant  » On ne va pas refaire le jugement  » !!!
    Juge des enfants refusant d’entendre la personne qui s’occupait d’une jeune fille de 16 ans depuis 2 ans et prenant le même décision que le juge précédent alors que ce type de décision avait amené la jeune fille dans une position de rejet de tout placement en foyer ou en famille d’accueil et la faisait fuguer en permanence . Ceci s’est termine par un viol au cours d’une fugue.
    L’AEMO37 a déclencher une enquête de la brigade des mineurs pour empêcher la jeune fille de retourner vivre chez son parrain qui l’hébergeait depuis 18 mois
    La STEMO chargée par le juge de faire une enquête sur la possibilité que la jeune fille continue a vivre chez son parrain , n’a fait aucune enquête et après 3 mois a remis un avis négatif sans avoir même entendu le père et la jeune fille ni visité l’appartement ou cette jeune fille avait sa chambre .!!

    J’ai tous les documents concernant cette affaire monstrueuse !

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